Les historiens de la Fraternité des Templiers Catholiques du Monde, ont retracé pour vous, l’histoire des Templiers. Toutes les informations que vous retrouverez sur cette page, sont issues de nombreuses heures de recherche. Si vous souhaitez apporter votre contribution à l’historique ci-présent ou bien nous poser des questions, nous restons à votre entière disposition.
Le 24 décembre ou le jour de la saint Jean d’hiver (27 décembre) 1118, Hugues de Payns et Godefroy de Saint-Omer fondent à Jérusalem une milice pour protéger les pèlerins affluant d’Occident depuis la reconquête de Jérusalem : la Milice des Pauvres Chevaliers du Christ et du Temple de Salomon, une communauté qui va pendant 3 siècles gérer une grande partie des richesses de l’Europe.
C’est d’abord un groupe de 9 chevaliers (“miles Christi” = soldat du Christ), installé par Baudouin II (couronné roi de Jérusalem, le 14 avril 1118, dimanche de Pâques) dans la partie méridionale du Temple de Salomon :
Hugues de Payns (ou Payens) de la Maison des comtes de Champagne (chevalier du Saint-Sépulcre),
Godefroy de Saint-Omer,
André de Montbard (oncle de saint Bernard),
Payen de Montdidier,
Geoffroy Bissol,
Archambault de Saint-Amand,
Rolland,
Gondemare et
Roral.
Le patriarche Garimond (ou Gormond) reçoit les vœux (pauvreté, chasteté et obéissance) des premiers frères (selon les us et coutumes des chanoines réguliers du Saint-Sépulcre, dont la milice conservera les rituels, rituels provenant de Saint-Victor de Paris par l’intermédiaire de Godefroi de Bouillon) et leur donne mission de “garder voies et chemins contre les brigands, pour le salut des pèlerins” (ut vias et itinera, ad salutem peregrinorum contra latronum) pour la rémission de leurs péchés.
Le 16 ou 23 janvier 1120, au concile de Naplouse dans le Royaume de Jérusalem, fondation officielle de la Milice des Pauvres Chevaliers du Christ et du Temple de Salomon.
En 1127, Hugues de Payns passe en Occident avec 5 frères (Godefroy de Saint-Omer, Payen de Montdidier, Geoffroy Bissol, Archambault de Saint-Amand et Rolland) pour obtenir du Saint-Siège la confirmation de son institut et pour demander conseil à Bernard de Clairvaux.
Le 13 janvier 1129, au concile de Troyes, l’assemblée comprend, outre le légat, 12 archevêques et évêques, 4 abbés bénédictins et 4 abbés cisterciens. À l’ouverture du concile, les frères chevaliers ne sont que 14.
Les Pères mettent au point la règle donnée par Garimond, en louant ce qu’ils estiment profitable et en retranchant ce qui ne leur semble pas justifié.
Bernard de Clairvaux s’étant dérobé, Jean-Michel Manrique écrit les 72 articles approuvés par le concile :
« Bien que certainement un nombre considérable de religieux Pères donne de l’autorité à mes paroles, je ne dois pourtant point passer sous silence ceux qui se trouvaient présents et qui donnèrent leur avis, moi, Jean-Michel, qui ai eu l’honneur, par une faveur du Ciel, d’écrire cette page par l’ordre du concile et du vénérable abbé de Clairvaux à qui ce soin revenait et avait été confié ».
La Règle des Pauvres Soldats du Christ et du Temple de Salomon est très stricte. Les punitions imposent des jeûnes sévères pour des délits concernant toute entorse aux règles de l’ordre.
Hugues de Payns demande plusieurs fois à l’abbé de Clairvaux d’encourager la jeune milice, mais Bernard ne manifeste pas beaucoup d’enthousiasme (l’admission du scandaleux comte de Champagne, Hugues de Troyes, semble être à l’origine de cette attitude).
Toutefois, entre 1128 et 1136, Bernard rédige le traité De laude novae militiae pour exposer à l’ordre naissant des Templiers quels principes spirituels doivent guider son action.
“Les Templiers, avant le concile de Troyes, n’étaient qu’au nombre de neuf ; on institua une règle pour les nouveaux religieux et on leur assigna un costume qui fut le vêtement blanc, en vertu des ordres du seigneur pape Honoré et du seigneur Étienne, patriarche de Jérusalem. Jusqu’alors ils n’avaient eu d’autres vêtements que ceux que le peuple portait à cette époque. Dans la suite et sous le pontificat du seigneur pape Eugène, à ce qu’on rapporte, ils commencèrent à faire attacher à leurs manteaux des croix faites de drap rouge que les chevaliers et les frères inférieurs appelés servants portaient également.” (Guillaume de Tyr)
“Leurs affaires ont si bien prospéré qu’ils ont en ce moment, dit Guillaume de Tyr, dans leur couvent environ trois cents chevaliers, tous revêtus du manteau blanc, sans compter les frères servants.“
Par la bulle Omne datum optimum du 29 mars 1139, Innocent II confirme l’institution des moines combattants :
« Nous vous exhortons à combattre avec ardeur les ennemis de la croix, et en signe de récompense, nous vous permettons de garder pour vous tout le butin que vous aurez pris aux Sarrasins sans que personne ait le droit de vous en réclamer une part. Et nous déclarons que votre maison, avec toutes ses possessions acquises par la libéralité des princes, demeure sous la protection et la tutelle du Saint-Siège. »
Le pape accorde au maître des Templiers, Robert de Craon, des privilèges considérables : droit de construire ses propres églises et de conserver le butin pris aux Sarrasins ; l’Ordre est placé sous la tutelle exclusive du Saint-Siège ; les évêques sont privés de tout ou partie des dîmes et de tout droit de regard sur les commanderies.
Les Templiers ont pour devoirs religieux :
L’obligation d’assister à la messe 3 fois par semaine, de faire abstinence les lundis et mercredis, outre les vendredis et les samedis, d’observer 3 grands jeûnes, d’adorer la croix solennellement à 3 époques de l’année, de communier 3 fois par an, enfin, toutes les maisons de l’ordre doivent faire l’aumône 3 fois par semaine.
Les chevaliers du Temple prononcent, à leur réception, les 3 vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, et prêtent en outre serment :
« Je jure de consacrer mes discours, mes forces, ma vie, à défendre la croyance à l’unité de Dieu et aux mystères de la foi ; je jure d’être soumis et obéissant au maître de l’ordre… Chaque fois que besoin en sera, je passerai les mers pour aller combattre, je donnerai secours contre les rois et les princes infidèles, et, en présence de trois ennemis, je ne fuirai point, mais seul je les combattrai… »
Dès lors, ils appartiennent entièrement à l’Ordre, renonçant à tout lien de famille, ne pouvant rien posséder en propre : c’est l’Ordre qui se charge de leur entretien.
Au sommet de l’Ordre, se trouve le maître, le Conseil, le sénéchal, les commandeurs.
Puis, viennent ensuite les chevaliers, les sergents, les casaliers chargés des fermes, les turcoples (troupes auxiliaires), les chapelains (les prêtres qui officient pour les Templiers – Minister Templi) et les frères de métiers.
Les manteaux de lin ou de laine des chevaliers sont blancs tandis que ceux des sergents, des chapelains et des écuyers sont gris ou noirs. Tous portent des ceintures ou cordes en fil de lin sur la chemise pour se rappeler leur vœu de chasteté.
L’étendard de l’Ordre, le gonfanon “baucent” (ou baussant) est constitué d’une bande noire et d’une bande blanche frappée de la croix latine pattée rouge (l’Ordre des Hospitaliers arbore la croix blanche, l’Ordre des Teutoniques la noire et l’Ordre de Saint-Lazare la verte.
« Non nobis Domine, non nobis, sed Nomini Tuo da gloriam »
« Non pas à nous, Seigneur, pas à nous, mais à Ton Nom donne la gloire » (Psaume 113)
« Memento finis » (Pense à ta fin !)
Le sceau de l’Ordre figure un cheval monté par deux cavaliers avec l’inscription : Sigillum militum Christi.
Contrairement à la signification homosexuelle qu’on lui a donnée, cette image est destinée à perpétuer le souvenir de la pauvreté primitive des chevaliers ; car, au commencement, ils étaient si pauvres qu’un seul cheval servait pour deux.
Au printemps 1304 ou 1305, ou en 1306 ou 1307 (selon les sources), un ex-commandeur des Templiers (exclu de l’Ordre), nommé Esquin de Floyran, incarcéré pour meurtre à Toulouse, révèle à son compagnon de cellule (qui mouchardera) que les Templiers adorent les idoles, qu’ils doivent, au cours de la cérémonie d’initiation, cracher 3 fois sur la croix, baiser diverses parties du corps des officiants, le bas de l’échine notamment, et s’engager à pratiquer la sodomie.
Le roi de France, Philippe IV le Bel, fait libérer Esquin de Floyran.
Il l’enverra répéter ses “révélations” au roi d’Aragon et au pape Clément V.
Des chercheurs sont persuadés qu’Esquin de Floyran connaissait très bien le chancelier Guillaume de Nogaret et qu’il a fait ses révélations en échange de sa liberté et moyennant une rétribution qu’il réclamera, en vain, début 1308.
Nogaret, qui hait les Templiers, fait organiser dans tout le royaume une savante campagne d’intoxication contre l’Ordre.
On ne demande pas mieux que de croire les accusations portées contre eux.
Certains des chevaliers font montre avec ostentation de leur puissance financière et on reproche à ces moines soldats de n’avoir pas su conserver la Terre sainte.
Le secret qui entoure la réception des nouveaux frères laisse place à toutes les calomnies : on soupçonne l’ordre de contraindre ceux qui veulent y entrer à cracher sur un crucifix, à renier la croix.
Outre les accusations sur un grand nombre de leurs actes en Palestine, mille bruits infâmes circulent sur leur vie intérieure, l’altération de leur foi mêlée de superstition orientale et de magie sarrasine, sur les vices dégradants qu’ils ont rapportés de l’Orient, sur les idoles qu’ils adorent, etc.
Les motifs personnels ne manquent pas au roi Philippe : plusieurs Templiers l’ont mal secondé lors de son appel contre le pape Boniface VIII, sa demande d’être admis dans l’ordre a été repoussée et il a emprunté beaucoup d’argent au Temple (qui est une sorte de banque pour les princes et les rois).
En avril 1305, lors de l’élection papale, Philippe le Bel et les Colonna apportent leur soutien au futur pape, Bertrand de Got, archevêque de Bordeaux.
Le 14 novembre, Bertrand de Got, pape sous le nom de Clément V, est consacré en présence du roi en l’église Saint-Just à Lyon.
En 1306, pressé par le roi de France (qui lui demande la suppression des Templiers, alors que, poursuivi par les émeutiers parisiens, il a trouvé asile chez eux), Clément V demande à Jacques de Molay, Maître des Templiers, d’accepter la fusion de son ordre avec celui des Hospitaliers, le nouvel ordre prenant le nom de Chevaliers de Jérusalem (la fusion des ordres militaires est souhaitée depuis un quart de siècle par les papes et les conciles) ; Jacques de Molay refuse.
Ruiné après la reddition de la Guyenne et de la Flandre, mis dans l’impossibilité de frapper de nouveaux impôts par le mécontentement populaire et ne pouvant dépouiller de nouveau les Juifs puisqu’il les a chassés, Philippe le Bel ne peut sortir de sa situation désespérée que par la destruction des Templiers afin de s’emparer de leurs dépouilles.
Le 14 septembre 1307, le roi Philippe, dans une lettre adressée à tous les officiers du pays, accuse les Templiers d’hérésie, profanation, idolâtrie et sodomie (l’acte d’accusation, lu dans toutes les provinces du royaume, est l’œuvre de Guillaume de Nogaret) et ordonne leur arrestation en un jour “donné gardé secret”.
Le vendredi 13 octobre 1 307, à 7 heures, les chevaliers sont arrêtés, leurs biens saisis.
Arrêté avec les autres templiers de France, Jacques de Molay avoue, le 24 octobre, sans être torturé (semble-t-il) certaines erreurs de l’Ordre en matière de foi et de morale.
Il écrit à ses frères pour les inciter à révéler ce qu’ils savent.
Le tribunal de l’Inquisition lui a demandé :
« Comment les frères ont-ils été reçus au Temple ? Les a-t-on dévêtus et baisés en bout de l’échine, sous la ceinture, sur le nombril et en la bouche, puis invités à pratiquer la sodomie ? ».
Trois baisers initiatiques étaient donnés aux frères par ceux qui les recevaient : sur les lèvres (baiser gnostique ?), le nombril et l’épine dorsale, selon Hugues de Bure ; sur la bouche, l’anus et le pénis, selon le frère Raoul de Gisy, receveur des finances royales en Champagne.
Molay a reconnu, qu’à son entrée dans l’ordre, on avait exigé qu’il crachât sur le Christ, mais qu’il s’était contenté d’expectorer par terre.
Selon Michelet, le chef principal de l’accusation, le reniement, avait un fondement réel : dans la cérémonie initiatrice, il est certain qu’on reniait le Christ, mais ce reniement, était-il symbolique, une imitation du reniement de Pierre ?
Du 19 octobre au 24 novembre 1307, 140 Templiers de Paris sont soumis à la torture des inquisiteurs ; l’un des chevaliers confie : « J’avouerais que j’ai tué Dieu si on me le demandait ! ».
Cent trente-sept avouent des ignominies :
– adoration d’idoles (Baphomet) ;
– adoration du dieu Mithra ;
– manichéisme ;
– reniement du Christ en crachant sur son image ;
– négation des sacrements ;
– messes noires ;
– rites obscènes ;
– homosexualité ;
– cupidité ;
– ivrognerie (boire comme un Templier : bien que certains prétendent que, dans cette locution, le mot Templier est une corruption de temprier, ancien nom des verriers) ;
– conversion à l’islam (en fait relation amicale probable avec l’Ordre militaire et initiatique des chiites ismaéliens, les Assassins, lui aussi gardien de la Terre sainte).
“Hugues de Pairaud, visiteur de France, explique le 9 novembre qu’il conduisait les jeunes Templiers dans des endroits secrets et se faisait baiser par eux sur la partie inférieure de l’épine dorsale, sur le nombril et sur la bouche. Ensuite, il faisait apporter une croix en présence du nouveau frère et il lui disait qu’il fallait, en vertu des statuts de l’Ordre, renier trois fois le Crucifié et cracher sur la croix et sur l’image de Jésus-Christ.” (Laurent de Vargas)
Baphomet fut au centre du dernier chef d’accusation porté contre le Temple, puisque les Templiers étaient censés lui rendre un culte plus ou moins « démoniaque », en tout cas non-chrétien, faisant d’eux des idolâtres, ce qui ne pouvait que les conduire à une mort certaine.
Notons ensuite que ce terme n’a jamais été prononcé par les accusateurs ni par les Templiers, mais seulement sous sa forme adjectivale baphométique ou bafométique.
Le fait en revient à un frère occitan de Montpezat, Gaucerant, qui avoua avoir adoré une « image bafométique » qui, en langue d’oc, est une déformation de Mahomet, comme le prouve un poème de 1 265, Ira et Dolor, E Bafomet obra de son goder, « Et Mahomet fait briller sa puissance ».
Ce frère devait ignorer que l’islam prohibe le culte des images et la représentation de Dieu, ce qui n’empêcha pas les accusateurs d’y voir une « preuve », de l’adoption par le Temple de rites musulmans.
Le témoignage du frère Gaucerant n’en fut pas moins à l’origine d’un malentendu qui permit aux auteurs et occultistes des siècles suivants de bâtir le terme « Baphomet », donnant lieu à tous les fantasmes possibles et imaginables.
En décembre 1307, Jacques de Molay et des dignitaires se rétractent devant 2 cardinaux envoyés par le pape.
5 au 15 mai 1308 : les États généraux de Tours approuvent les poursuites de Philippe le Bel contre les Templiers.
Le 5 juillet, le pape, après avoir auditionné 72 membres de l’Ordre, se dessaisit de l’affaire des Templiers et la remet à l’Inquisition.
Il décide que des conciles provinciaux jugeront, en tant que personnes, les Templiers et qu’un concile se prononcera sur le sort à réserver au Temple en tant qu’institution.
Le 12 août, à Poitiers, la bulle Faciens misericordiam crée des commissions diocésaines chargées d’enquêter sur les agissements des Templiers et des commissions pontificales chargées de juger l’Ordre du Temple ; la bulle Regnans in cœlis convoque un concile, à Vienne sur le Rhône, qui se prononcera sur le sort à réserver au Temple en tant qu’institution.
Le 12 novembre 1309 se tient la première commission pontificale : le pape s’étant réservé le jugement des personnes de quelques dignitaires (aux termes de la bulle Faciens misericordiam rédigée en août), Molay, attendant le jugement du pape, garde le silence ; un seul frère, Ponsard de Gisy, précepteur de la commanderie de Payns, dénonce les aveux faits sous la torture.
Le 7 avril 1310, 9 chevaliers présentent la défense de l’Ordre devant la commission pontificale.
En mai, Philippe le Bel réunit le concile provincial de Sens, présidé par une âme damnée de Philippe, l’archevêque de Sens, Marigny, frère du ministre Enguerrand de Marigny : 54 Templiers étant revenus sur leurs aveux sont condamnés comme relaps et brûlés le 12.
De semblables exécutions sont ordonnées, et avec la même rapidité, par les conciles provinciaux.
Les chevaliers qui échappent à la mort sont condamnés à de lourdes peines.
Le 11 mai 1310, 21 templiers se présentent au concile de Mayence pour protester de leur innocence et en appeler au pape.
Le 21 octobre, un synode réuni à Salamanque déclare les Templiers innocents ; des synodes ont fait de même et à Ravenne le 17 juin et à Mayence le 1er juillet.
À l’issue du Concile de Vienne, les quatre principaux dignitaires de l’ordre, Jacques de Molay, Hugues de Pairaud, Geoffroy de Charnay et Geoffroy de Gonneville, n’étaient pas concernés par les décisions de celui-ci. Le pape Clément V s’était réservé de régler leurs cas plus tard.
Le 22 décembre 1313, il chargea donc trois cardinaux non de juger, mais de signifier la sentence aux quatre derniers dignitaires : Les trois cardinaux arrivent à Paris au début de mars 1314.
Depuis mars 1310, Molay, Charnay, Pairaud et Gonneville étaient emprisonnés à Gisors, dans le château royal devenu une prison d’État.
Devant la commission envoyée à Paris, les templiers renouvelèrent, une fois de plus, leurs aveux.
Le 18 (ou 11) mars 1314, ces cardinaux entourés du légat du pape le cardinal d’Albano, faisaient amener les accusés sur le parvis de Notre-Dame de Paris pour leur signifier publiquement la sentence définitive qu’ils avaient décidé de prendre à leur encontre. Les templiers furent installés sur une estrade et dans un silence impressionnant, la décision tomba : ils étaient condamnés « à la prison perpétuelle et sévère » !
Comprenant la situation, Molay, le dernier maître du Temple, se révolta. Malgré plus de six longues années de détention, il trouva suffisamment de force pour s’insurger contre l’hypocrisie de Philippe IV le Bel et du pape Clément V. Il confessa son erreur de jugement, sa tactique de défense et dénonça les tourments qu’il avait endurés.
Encouragé par les paroles du maître, Geoffroy de Charnay protesta également. En revenant sur leurs aveux, ces deux dignitaires connaissaient le sort réservé aux relaps : le bûcher.
Hugues de Pairaud et Geoffroy de Gonneville gardèrent le silence et acceptèrent la sentence : la prison à vie.
L’anonyme rédacteur de la continuation de Guillaume de Nangis, le plus précis parmi les sources contemporaines, nous relate l’événement :
« Le grand maître de l’Ordre des Templiers et trois autres templiers […] avouèrent tous quatre ouvertement et publiquement les crimes dont on les accusait en présence de l’archevêque de Sens [Philippe de Marigny] et de quelques autres prélats et hommes savants en droit canon et en droit divin, assemblés spécialement pour ce sujet d’après l’ordre du pape, par l’évêque d’Albano et deux autres cardinaux, et auxquels fut donnée communication de l’avis du conseil des accusés. Comme ils persévérèrent dans leurs aveux et paraissaient vouloir y persister jusqu’à la fin, après une mûre délibération, sur l’avis dudit conseil, ladite assemblée les condamna, le lundi après la fête de saint Grégoire, sur la place publique du parvis de l’église de Paris [Notre-Dame] à la réclusion perpétuelle.
Mais voilà que, comme les cardinaux croyaient avoir définitivement conclu cette affaire, tout à coup deux des templiers, à savoir le grand maître de l’outre-mer et le grand maître de Normandie, se défendirent alors opiniâtrement contre un cardinal qui portait alors la parole et contre l’archevêque de Sens et, sans aucun respect recommencèrent à nier tout ce qu’ils avaient avoué, ce qui causa une grande surprise à beaucoup de gens ».
Devant cette situation inédite, les cardinaux, pris de court, ne savent comment réagir et décident de renvoyer l’affaire au lendemain. Bien entendu, l’information arrive très vite à Philippe le Bel, qui une fois de plus, outrepasse ses droits et décide de se substituer à l’autorité pontificale. Il condamne à mort Molay et Charnay et ordonne, pour le soir même, leurs exécutions.
Reprenons la suite du récit du continuateur de Guillaume de Nangis :
« Les cardinaux les ayant remis entre les mains du prévôt de Paris alors présent, seulement pour qu’il les gardât jusqu’à ce que le jour suivant ils délibérassent plus complètement à leur égard, aussitôt que ces choses parvinrent aux oreilles du roi qui était alors dans le palais royal, il consulta avec les siens, et, sans en parler aux clercs, par une prudente décision, fit livrer aux flammes les deux templiers, vers le soir de ce même jour, dans une petite île de la Seine, située entre le jardin royal et l’église des frères ermites ».
Pour l’emplacement du bûcher, voici la description d’Alain Demurger dans son livre Jacques de Molay
– Le crépuscule des templiers :
Le bûcher fut dressé sur un îlot au bout de l’île de la Cité, au-dessous des Jardins du Roi. Ce jardin s’arrêtait au Pont-Neuf actuel et la pointe formant l’actuel square du Vert-Galant n’existait pas encore.
L’îlot n’appartenait pas au Roi, mais à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Cet îlot était situé sur le côté des jardins du roi, à la place du quai des Orfèvres et de la place Dauphine actuelle et non à la pointe de la cité ; il sera appelé au XIVe siècle « Île aux Juifs ».
Pour la petite histoire, le chroniqueur Villani indique que certains spectateurs recueillirent les cendres de Molay avant qu’elles ne soient dispersées :
« Il faut noter que, dans la nuit qui a suivi le martyre du grand maître et de son compagnon, leurs corps et ossements furent recueillis comme saintes reliques par des frères et autres religieux, et mises à l’abri dans des lieux saints ».